ANALYSE RÉFÉRENTIELLE
ET ARCHÉOLOGIQUE
Pierre Curie
Le roman inachevé d’un utopiste
Clermont-l’Hérault (1950 – 1955) :
édifier une communauté active
Sommaire
Prologue
Introduction
Clermont-l’Hérault
La nomination
Accueil
Clermont-l’Hérault
À pied
d’œuvre
Les jeunes
Communauté active
Ouvrir
la communauté
Une porte
s’ouvre
Difficultés
Un pasteur
communiste ?
Point
d’orgue
Parole
d’utopie
Fin
de partie
Saint-Quentin
Bruay-en-Artois
Tourcoing
La crise
Épilogue
. . . . . . . . - o
0
o - . . . . . . . .
Fidèles à la méthode que nous nous étions donnée à la manière de
Paul au sein de sa communauté juive d’origine, nous avons toujours voulu porter une attention particulière à la petite communauté protestant de
Clermont. Mais existait-il véritablement une « communauté » ? Nous avions plutôt découvert (peut-être la mentalité méridionale favorise-t-elle ce penchant) une bonne dose d’individualisme chez nos quelques familles, où la tradition des rites religieux de la vie (baptême, communion, mariage et mort) tenait le plus souvent lieu de « piliers de la foi ».
Au cours d’une assemblée en 1953, à laquelle participaient vingt-trois membres, fut posée la question de leur présence au culte. La réponse fut sans ambiguïté : douze (dont trois hommes) s’y déclarèrent personnellement engagés, les onze autres s’abstinrent… Sans doute, pour les premiers, le culte dominical resta au cours de ces années un lieu privilégié de ressourcement et d’engagement.
Ainsi, chaque dimanche matin, la modeste salle du Foyer évangélique rassembla dans un culte réformé traditionnel entre quinze et vingt fidèles, et aux grandes occasions entre vingt et trente. La prédication donnée chaque semaine eut l’ambition de faire entendre une parole capable de provoquer dans l’existence quotidienne de chacun des signes d’une humanité nouvelle… Quelle utopie !
Cette salle qui n’avait rien d’un édifice religieux et qui s’ouvrait de plain-pied sur la rue passante, allait-elle donner à quiconque l’aurait souhaité la liberté d’en pousser la porte vitrée ? Liberté toute formelle, car à une exception près qui fut un petit événement, jamais cette porte n’a été franchie un dimanche matin par un étranger à la communauté protestante, alors qu’elle le fut maintes fois quand la salle retrouvait sa neutralité.
En effet, événement qui fut exception et presque scandale, une dame de la bonne société catholique clermontoise, pratiquante fidèle mais qui étouffait dans son milieu, eut le courage ou la témérité, un dimanche matin, de passer la porte du Foyer, et assista, aux côtés de son amie protestante, au culte réformé ! Hélas, la pression de son milieu sur elle fut si contraignante qu’elle me déclara quelques jours plus tard qu’elle ne pourrait plus renouveler son audace.
Aussi, comme jadis
Paul à la synagogue, avons-nous dû appeler les protestants à vivre non sous le poids de la « loi » des traditions, mais dans la liberté et l’ouverture de la « grâce ».
1992
tc410600 : 14/07/2019