ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Pierre Curie


Le roman inachevé d’un utopiste





Tourcoing (1960-1967) :
le protestantisme à Tourcoing


Sommaire

Prologue

Introduction

Clermont-l’Hérault

Saint-Quentin

Bruay-en-Artois

Tourcoing
- Introduction
- Le protestantisme à
  Tourcoing

  . Les origines
  . L’extension
  . 1949-1959
  . Sociologie de la paroisse
  . Une paroisse sous-
    développée
  . Rassembler et fortifier
- Communauté vivante
- Sensibilisations
- Parole d’utopie
- L’impasse
- Recherche de structures
   nouvelles
- Expériences nouvelles
- Vers la crise

La crise

Épilogue




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Vers l’impasse


   Engagé à l’automne 1960, mon ministère à Tourcoing devait se poursuivre jusqu’à l’été 1968 en deux périodes, qui revêtirent une majeure pour l’avenir de la paroisse comme pour le mien. La seconde devait se résoudre en une grave crise de plusieurs mois, en étroite affinité avec les événements qui ébranlèrent la société française au printemps de 1968.

   Durant la première période, qui embrassa les années 1960 à 1964, pasteur et Conseil presbytéral en étroite collaboration (ce qui ne signifie pas sans âpres discussions parfois), nous sommes efforcés, adossés aux formes traditionnelles des activités paroissiales, de rassembler, fortifier, dresser ou redresser cette communauté minuscule, afin de l’inciter à exprimer sa foi au sein de la cité.
   Puis, sous la contrainte des lourdes difficultés financières qui traversa la région synodale du Nord, la paroisse de Tourcoing vécut de 1964 à 1967 une situation nouvelle, prélude à la crise de 1968. En effet, prisonnière de ses trop faibles ressources humaines et financières, il lui fut impossible de bénéficier plus longtemps du service à temps plein d’un pasteur, et elle fut contrainte par une décision du Conseil régional, de le partager à partir de septembre 1964 avec le Centre de recherche et de rencontre du Nord, installé à Lille et dirigé par le pasteur Ennio Floris (1).

   Rassembler et « dresser » la communauté pour mieux l’insérer dans la cité, telle fut l’orientation qui prévalut tant que je pus consacrer un service complet à la paroisse. En octobre 1960, j’écrivais dans ma première lettre aux membres de l’Église : « Nous devrons rechercher avant tout à approfondir sérieusement le sens de notre vie chrétienne à travers le culte dominical, afin de recevoir du Seigneur vivant forces et directives avant de nous disperser dans le monde et y vivre la grâce reçue ». Cette expression était une allusion aux orientations d’alors, en particulier dans le Nord, selon la dynamique théologique très orthodoxe à l’époque du rassemblement autour de la « parole » évangélique de la communauté, en vue de son témoignage dans la dispersion du monde.
   Pour favoriser cette communauté spirituelle et fraternelle, allaient aussi être reprises les réunions de quartier, les journées paroissiales et les fêtes de l’Église, sans négliger l’action privilégiée auprès de la jeunesse. La lettre rappelait in fine l’exhortation paulinienne : « Vous êtes la maison que Dieu édifie… » (1 Co 3:9-11).
   Un mois plus tard, les membres de l’Église recevaient l’information qui précisait, de la part du Conseil presbytéral, le sens du « projet » inspiré du prophète Jérémie : « projet de paix afin de vous donner un avenir et une espérance » (Jr 29:11) : « nous l’avons recherché dans deux directions : la redécouverte par notre Église du souci de l’évangélisation, et la prise en considération de la déclaration du synode national de Toulouse du 13 juin 1960 sur le drame algérien ».

   Avant toute chose, il importe de souligner la volonté d’agir « démocratiquement » qui nous a animés en toutes circonstances. Le régime « presbytérien-synodal » qui structure la vie de l’Église réformée de France est sans doute un rare privilège qui instaure entre les membres et les diverses assemblées (locales, régionales, nationales) de l’Église un authentique processus démocratique, quand rien ni personne ne vient le fausser ou le contrarier.
   À l’encontre d’une opinion qui fut mal­encontreusement répandue au cours de ces années, toutes les initiatives, tant celles concernant la vie « quotidienne » de la paroisse que celles qui engagèrent des orientations nouvelles, voire des mutations profondes, ont toujours été prises après que le Conseil presbytéral, puis l’ensemble des membres présents en assemblée générale, en aient été saisis, puis en aient discuté et les aient approuvées ou modifiées par leur vote. La responsabilité du pasteur fut seulement d’inspirer (et il ne s’en priva certes pas), puis de coordonner. « L’Église de Tourcoing n’est ni un pasteur ni un Conseil presbytéral seulement – écrivions-nous aux membres de la communauté à l’occasion de l’assemblée générale du 27 février 1966 – mais une communauté dont les problèmes doivent être débattus sur une base communautaire, chacun des fidèles s’engageant aux côtés de ses frères, après avoir examiné avec eux les problèmes de l’heure ».
   Les assemblées générales n’ont jamais été des « chambres d’enregistrement » de décisions déjà prises par le pasteur ou même par le Conseil presbytéral, mais elles ont toujours été des lieux privilégiés de liberté où chacun a été appelé à prendre une part active et personnelle à toutes les orientations et engagements proposés à la paroisse. Au fil des ans s’était ainsi instaurée une réelle vie démocratique, où tous ceux qui y prenaient intérêt (et personne n’en fut jamais exclu) purent, dans le dialogue et le partage, participer effectivement à l’édification de la communauté en vue de son action dans tous les domaines, et dans la cité en particulier.

______________

(1) Voir une brêve biographie d’Ennio Floris par Jacques Lochard (1986), l’autobiographie d’Ennio Floris (2012), et son autobiografia (2005).      Retour au texte



1992




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