ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Pierre Curie


Le roman inachevé d’un utopiste





La crise
(juin 1967 – juin 1968)


Sommaire

Prologue

Introduction

Clermont-l’Hérault

Saint-Quentin

Bruay-en-Artois

Tourcoing

La crise
- Introduction
- Changer...
- Les Centres régionaux
- Le Centre du Nord
- Faire front
- Aux limites
- Double jeu
- Visite d’Albert Gaillard
- Interventions en soutien
- La réunion de Palaiseau
- Le synode de Royan
- La dernière proposition
- Contrepoint

Épilogue




. . . . . . . . - o 0 o - . . . . . . . .

Quelques voix s’élevèrent…


   Aux mois de février et de mars 1968, deux interventions tentèrent, pour notre soulagement, de briser ce mur de l’omerta officielle, celles du pasteur Georges Casalis, alors professeur à la Faculté de théologie de Paris, et du pasteur Ennio Floris, directeur du Centre régional du Nord (1). Tous deux firent part au Secrétaire général de l’Église réformée de France de leur inquiétude et de leur émotion.

   Le vingt-et-un février, le pasteur Georges Casalis lui écrivit : « Afin que nul malentendu ne subsiste, je précise que je suis loin d’être d’accord avec certaines positions exprimées par écrit par Ennio Floris… mais il est incontestable que les questions posées par lui correspondent à quantité d’inter­rogations de membres pasteurs et laïcs de nos Églises…
   J’ai moi-même été à Lille le témoin de l’extraordinaire sensibilisation à l’Évangile qui s’est produite chez un certain nombre de chrétiens par l’intermédiaire de ministères aujourd’hui mis en question de façon radicale, comme le sont ceux de Curie et de Floris. Il n’est pas certain que les gens remarquablement mis en mouvement par eux puissent rester dans une Église qui aura évacué de son sein ces « gêneurs ».
   Que l’on dise que Curie doit se reclasser comme il le pourra et qu’on trouvera à employer ailleurs qu’en France les dons d’Ennio me semble un jugement tragique sur la pauvreté et le manque de générosité de nos Églises. Le procédé me semble d’autant plus inacceptable que l’on n’a pas fait l’effort d’avoir avec les intéressés et d’autres le ou les colloques qui auraient permis de voir si effectivement, comme on le leur dit, ils sont « hérétiques » au fond, ou ne visent pas dans leur recherche une authentique formulation de l’Évangile pour le temps présent… Ceci est d’autant plus regrettable qu’on se garde bien de poser la moindre question à ceux qui, dans l’autre sens, qu’ils soient pasteurs ou non, prennent des positions théologiquement irrecevables par leur conserva­tisme, et politiquement ou apolitiquement réaction­naires. N’importe qui peut aujourd’hui déclarer qu’Adam a réellement existé, que l’on peut historiquement prouver la résurrection du Christ !
   Ma conviction est claire, l’avenir n’est pas en-deçà, il est au-delà des questions posées par Ennio et tant d’autres aujourd’hui. Ma conviction est que nous sommes en grand danger de laisser se durcir un visage orthodoxe de l’Église... Il me semble indispensable d’avoir dans les mois qui viennent, et si possible avant le synode national, un colloque aussi peu nombreux et spectaculaire que possible, où l’on essaiera, une fois de plus, de voir comment l’unité et le témoignage dans le temps présent n’excluent ni l’audace de la recherche, ni la diversité des options théologiques ».

   Et voici quelques-unes des interrogations que, le vingt-cinq mars suivant, posait de son côté, sans aucune référence à la lettre précédente, le directeur du Centre du Nord au Secrétaire général de l’Église réformée : « On accuse Pierre Curie de susciter le scandale parce qu’il met en question la confession de foi de l’Église, et en doute la validité de l’institution. L’écarter, c’est montrer que l’on se soucie seulement des « fidèles », de ceux qui restent dans le troupeau, et que l’on tient à les rassurer et à les garder d’une éventuelle « hérésie ». Même si ce désir est légitime, cela justifie-t-il que l’on abandonne les autres, ceux qui partagent les perspectives de Pierre Curie ? Cela autorise-t-il à l’enlever à tous ceux qui, ayant quitté l’Église, avaient trouvé en lui l’occasion d’une redécouverte, d’une relecture de l’évangile ? Cela autorise-t-il enfin que l’on rompe le dialogue engagé par lui avec les milieux athées qui, tout en se réjouissant de cette possibilité de dialogue, trouvent en lui un adversaire bien plus redoutable que des orthodoxes ou des piétistes ? »

   Mais le Secrétaire général de l’Église réformée de France avait-il lui-même, alors, quelque chance d’être entendu et aussi quelque pouvoir effectif de modifier le cours des événements ?

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(1) Voir une brêve biographie d’Ennio Floris par Jacques Lochard (1986), l’autobiographie d’Ennio Floris (2012), et son autobiografia (2005).      Retour au texte



1992




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