uisque l’humanisme et le cartésianisme parviennent au même but, il importe qu’ils soient unis pour guider les adolescents dans leurs études. Centrés sur la connaissance de soi, tous deux visent à « rappeler l’esprit dispersé dans les sens ». L’humanisme conduit à la dignitas de notre humanité par la découverte de sa divinité dans la parole et dans l’art. Le cartésianisme nous achemine vers la vérité, après nous avoir libérés des préjugés des sens. Le « connais-toi toi-même » se traduit en deux impératifs : dii estis et inquire veritatem : le premier est lancé par Pic de la Mirandole, le second exprime la démarche cartésienne, tous deux sont repris par Vico (9).
Vico veut que la jeunesse de son temps, à laquelle il s’adresse, soit éclairée par cette double lumière. Il parviendra à pénétrer dans les deux courants humaniste et cartésien, suivant les implications pédagogiques et didactiques de ces deux impératifs. Pour l’heure, il cherche d’une part à réunir la culture brisée, d’autre part à pousser les jeunes aux études, à partir du principe qui les réunit, principe qui affirme que nous portons des « notions » d’infini, « renfermées dans l’esprit comme des étincelles », ces notions contribueront à « allumer l’incendie de l’érudition » (10). L’humanisme parvient ainsi au seuil de l’illuminisme.
Se référant à ce premier discours, l’Autobiographie ne mentionne pas la tension entre les deux cultures. Seul demeure dans la mémoire du philosophe déjà avancé en âge l’appel à la divinité de l’homme, qu’il veut inscrire dans le cadre de la « mens » directrice de l’histoire. L’homme ne connaît de limites que celles posées par son propre pouvoir. En effet, « nous ne devenons pas savants en toutes choses, parce que nous ne le voulons pas. Cependant, lorsque nous le voulons vraiment, nous faisons des choses que nous admirons, les ayant accomplies, comme si elles avaient été créées non par nous-mêmes, mais par un dieu » (11).
Ces paroles indiquent que le philosophe a dépassé l’illuminisme ; ayant abandonné le cartésianisme, il redécouvre l’homme-dieu dans la fureur héroïque de l’imagination. Dans son premier discours, il a convoqué ses auditeurs au temple de Delphes, comme pour un culte, « culte de la divinité de notre propre esprit » (12).