’argument de ce discours est l’impact des responsabilités éthiques des hommes dans leurs conditions historiques d’existence. Au point de départ de la méditation, se trouve l’analogie entre l’homme et Dieu, qui avait polarisé la réflexion du premier discours.
Il y a là un des aspects qui séparent la pensée de Vico de celle de la théologie médiévale. En effet, l’accent n’est plus mis sur le rapport de verticalité, mais d’horizontalité où l’homme n’est que puissance, saisi dans son activité dans l’histoire, tandis que Dieu est « acte » dans sa « créativité » à l’égard de la nature.
Pour connaître l’homme, il suffit donc de regarder l’histoire en opposition à la nature, qui apparaît comme un ensemble de forces liées réciproquement par des lois relevant toutes d’un pacte (foedus), que le Créateur a établi dès le commencement. Cet ordre est maintenu parce que les êtres jouent toujours le même rôle assigné par Dieu.
Au niveau de l’humain, au contraire, les choses « non seulement sont diverses et opposées, mais elles s’aliènent et s’éloignent de plus en plus de la commune nature », de telle sorte qu’elles deviennent « autres ». Cette aliénation ne poserait pas de problèmes si l’homme n'était pas dieu dans son histoire. Mais puisqu’il doit se conduire dans son domaine comme Dieu dans la nature, la question se pose de savoir d’où vient ce désordre et si l’analogie avec Dieu est rompue. Que reste-t-il alors de l’homme, puisqu’il avait été défini dans le cadre de cette analogie ?
Deux théories s’offrent à Vico : d’une part celle du matérialisme classique qu’il connaissait par l’épicurisme de Lucrèce, pour qui les mutations et les oppositions des choses humaines dérivent de la matérialité de l’âme (l’homme, en effet, n’est qu’un produit du hasard, à la suite de la collision et de la conversion des atomes constitutifs de la matière de l'univers) ; d’autre part, celle qui remonte à la théologie et aux religions (le mal est une expiation consécutive à une faute commise par l’homme dans un état antérieur à l’histoire) (2).
Vico rejette également ces deux théories, bien qu’il se sente davantage attiré par la seconde. Il refuse le matérialisme parce qu’il ne reconnaît pas l’existence d’une causalité providentielle. L’homme proviendrait du hasard, lui qui est prince de la création ? Vico écarte aussi l’autre théorie, parce qu’il lui répugne de considérer les hommes comme coupables d’une faute qu’ils n’auraient pas commise.
Si la vie des hommes lui apparaît bien comme l’expiation d’une faute, celle-ci doit pouvoir leur être imputée. Les hommes sont, en effet, soumis à l’alliance de Dieu au même titre que la nature ; les choses matérielles y sont liées par nécessité, tandis que l’homme l’est par liberté morale. Libre d’obéir ou de désobéir, il s’ouvre le chemin vers la sagesse ou vers la folie.