ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



La  rupture  cartésienne  et  la  naissance
d’une  philosophie  de  la  culture
dans  les  œuvres  juvéniles  de  J.-B.  Vico





Regard rétrospectif :
Démarche pour une pensée créatrice






4- Une culture de l’imagination



Magnum Dictionarium, de P. Danet, 1691





Profil biographique de Jean-Baptiste Vico


INTRODUCTION


LES DISCOURS

Vico orateur

La connaissance de soi et la divinité de l’homme

Conscience éthique et conscience historique

La morale des intellectuels

La politique du pouvoir et la politique de l’autorité

Le droit de la guerre et la sagesse du Droit

La corruption de la nature et la méthode des études

La rhétorique des Discours et le projet philosophique de J.-B. Vico



DE NOSTRI TEMPORIS STUDIORUM RATIONE

Vue d’ensemble

La controverse des Anciens et des Modernes et la conscience historique

La nouvelle science

La controverse des langues

Langue et méthode

Le vraisemblable et le sens commun

Le « cogito » cartésien et l’interrogation vichienne du doute

Logique analytique et logique synthétique

Métaphysique et mathématiques


DÉMARCHE POUR UNE PENSÉE CRÉATRICE
L’échec de l’humanisme et la
  rupture cartésienne
La démarche rhétorique et
  méthodologique
La jeunesse et les temps
  nouveaux
Une culture de l’imagination
Vers une philosophie de la
  création


BIBLIOGRAPHIE


ico a espéré que le nouveau projet d’homme serait supporté par ces jeunes eux-mêmes auxquels il s’est adressé dans ses deux premières œuvres. Même si les jeunes l’avaient compris et suivi, il aurait été trop tard, car le XVIII° siècle s’était déjà acheminé vers la culture des Lumières.

Déjà, à partir de la fin du XVII° siècle, la métho­de cartésienne s’était révélée incapable de répon­dre aux exigences épistémologiques requises par l’importance de plus en plus croissante des infor­mations. En raison de son caractère déductif, elle se présentait toujours comme un modèle d’articu­lation de la pensée, mais elle se refusait à prendre en charge tout objet ne se laissant pas réduire à des principes d’évidence. Dans tous les domaines, dans les langues comme en philologie, dans la critique littéraire et artistique, dans l’histoire et dans l’économie, l’érudition demeurait dans l’at­tente d’une systématisation rationnelle.
   À cette date, on a redécouvert Bacon, dont le Novum organum et le De augmentis scientiarum offraient des schémas logiques et épistémo­logiques rendant possible cette systématisation. L’union de la logique baconienne et de la méthode analytique cartésienne fut le creuset de l’esprit en­cyclopédique qui anima la culture des Lumières.
   Pour s’en convaincre, il suffit de se rapporter à l’article de Diderot intitulé « Encyclopédie », qui constitue à bien des égards la charte de la nouvelle culture (1). Le cartésianisme y apparaît clairement comme l’exigence d’une pensée cohérente et dé­ductive, unissant la clarté à la rigueur mathéma­tique. Mais le support de l’organisation du savoir en système rationnel est constitué par la triparti­tion baconienne, correspondant aux trois facultés fondamentales de l’esprit : la mémoire, l’imagina­tion et la raison, fondatrices respectivement des sciences historiques, des arts et de la philosophie.
   Sans doute, lorsque Vico a écrit ses premières œuvres, l’encyclopédie n’était pas encore parve­nue à une claire définition d’elle-même. Cepen­dant elle constituait l’axe dominant de la culture, au moment où la langue française était devenue le moyen commun d’expression.

Quant à l’orientation générale, les deux premières œuvres de Vico semblent s’inscrire dans des perspectives illuministes. À leur manière elles re­prennent l’idéal mathématique, et elles tendent à une vision unitaire des sciences, dans l’esprit de Pic de la Mirandole et de Bacon lui-même. Il faut aussi relever que l’influence de ce dernier y est déterminante, car le De ratione veut réaliser dans le contexte historique de la culture la visée ency­clopédique du De augmentis scientiarum. Son projet encyclopédique précède donc d’une tren­taine d’années celui de Diderot.

Cependant Vico ne fut pas, en réalité, un illu­ministe. S’il a accepté la tripartition baconienne, il y a apporté une profonde modification, l’insérant dans le cadre d’un autre statut logique. Alors que chez Bacon mémoire, imagination et raison s’or­donnaient sur une échelle hiérarchique de valeurs, dont la raison est le sommet, chez Vico leur or­donnance est brisée au moyen de l’ingenium qui devient le centre polarisateur de la mémoire et de l’imagination. Ainsi la tripartition a cédé la place à une dichotomie, constituée par l’ingenium et la raison.
   Cette rupture montrait aussi que Vico avait abandonné la logique aristotélico-thomiste pour suivre celle de Cicéron, fondée sur l’opposition entre invention et dialectique ; cette dernière devint cependant chez lui celle de logique de la création et de logique du jugement. Ainsi, au moment où il paraissait adhérer à des perspectives illuministes, Vico s’en est détaché par une exi­gence d’imagination créatrice, qui n’a trouvé d’écho qu’à la fin de l’Encyclopédie. Quand, au­tour de lui, chacun recherchait une culture de l’es­prit, il était à la recherche d’une culture de l’in­genium. Il se trouva enfermé dans une solitude qui prend aujourd’hui valeur d’une « époké » his­torique.




Thèse soutenue le 22 juin 1974




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t313040 : 05/10/2017