ien que les réflexions poursuivies dans le De ratione n’aient pas eu d’impact sur la culture de leur temps, elles constituèrent pour Vico la démarche méthodologique d’une entreprise philosophique tout à fait originale. Celle-ci avait surtout été déterminée par des problèmes demeurés en suspens dans le De ratione, principalement celui du fondement des mathématiques, dont Vico avait indiqué la solution sans en donner de démonstration.
Nous avons pu nous-mêmes en prendre connaissance en nous rapportant au De antiquissima, ce qui suppose que le principe de la pensée créatrice était moins objet de recherche directe que de découverte d’un principe implicite dans l’étude sur la méthode. Dans le De ratione, l’intention philosophique demeurait au niveau de l’infrastructure du texte qui, à sa surface, ne montrait qu’un souci méthodologique et pédagogique. Au terme de son œuvre, Vico avait reconnu ses limites, dans lesquelles il avait voulu lui-même la tenir, pensant déjà la poursuivre au niveau philosophique.
Rien ne pouvait être résolu sans solution au problème du fondement des mathématiques, qui constituait l’enjeu d’une pensée synthétique. Sans cette solution, la pensée vichienne serait demeurée écartelée entre la topique et le jugement, incapable de dépasser l’échec de l’humanisme comme la rupture cartésienne. Pour aborder ce problème, il fallait partir du « je pense » lui-même, et affronter directement Descartes sur son propre terrain. Vico ne s’y est pas dérobé, ces nouvelles réflexions sont contenues dans le De antiquissima, qui est aux Discours ce que, chez Descartes, les Méditations sont au Discours de la méthode.