ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



Chronique  de  Marie-Madeleine



Roman





Chapitre 3 - Le banquet des noces :

Le banquet



La logique ou l’art de penser, de Nicolle et Arnauld, 1664 





Présentation


Texte intégral :

La rencontre d’amour

Les disciples du Royaume

Le banquet des noces
- Dans la cour de Lévi
- La parabole du royaume
- La révolte des impuissants
- Le banquet
-
Maladie d’amour

Itinéraire d’un bâtard

Le défi

La fugue

Sur le pont du bateau

Chemins d’amour

Dalmanutha

Transfiguration et insurrection

La Dédicace

Correspondances

Béthanie

Gethsémani

Le procès

Golgotha

L’enterrement

Le jour de la Pâque

Le tombeau vide

Les semeurs


a joie renaissait dans nos cœurs, le rire éclatait sur nos lèvres. Remise de ma détresse et de mon humi­liation, de nouveau à l’aise dans ma vie d’épouse, je restais solidaire des gens de mon ancien milieu.

   Des serviteurs avaient allumé les lampes, bien que la nuit ne soit pas encore tombée ; des servantes ap­portaient des corbeilles d’agrumes, de fruits et de sa­la­des. Précédés par Pierre, les disciples portaient des plateaux débordant de poissons rôtis ou frits, avec des beignets de courgette et d’aubergine, et des olives farcies.

   La face rubiconde sous l’effet du feu et du bon vin qu’il avait ingurgité en préparant le repas, Pierre était très gai : « Salut, mes frères, excusez-moi de n’avoir pas été parmi vous ; pourtant j’étais très proche quand, avec André et Jacques, j’ai pêché les poissons que voici. Dieu nous a ouvert les eaux, et a ordonné aux poissons de gonfler nos filets pour vous rassasier. Que le lac était beau, la nuit dernière ! Calme, silen­cieux, pailleté de reflets, il favorisait notre guet. La lune était haute sur l’horizon, avec sa face ronde, ses yeux oblongs et sa bouche rieuse ; les étoiles scintil­laient, aussi nombreuses que les fils d’Israël promis à Abraham. Alors nous avons jeté nos filets, lancé nos perches, et nous avons plongé pour saisir les poissons de nos mains. Au milieu des eaux, nous étions débor­dés ; les poissons se pressaient et dansaient autour de nous, ils étaient des milliers, comme ceux que Dieu multipliera dans les eaux pures du temple, lors de l’accomplissement des promesses. C’était pour nous un plaisir d’enfant, une fête comme celle du premier homme au jour de la création.

Oh ! Combien les poissons étaient heu-

   Tous se mirent à manger, trouvant les poissons savoureux :

Oh ! combien les poissons sont délicieux,
Grillés pour rassasier les bienheureux !


Lévi descella une amphore de vin nouveau, en fit remplir deux cruches et le versa dans les coupes de chacun. Puis, levant la sienne, il dit :
- Je suis heureux, frères, de vous avoir ouvert ma maison et sa cave bien garnie, et de boire ce vin nou­veau avec vous ! Que chacun boive, en signe des temps où les cieux exauceront la terre, où la terre exaucera le blé, la vigne et l’olivier, et où le blé, le vin et l’huile exauceront les pauvres ! Heureux les pau­vres, avec qui les riches partageront leur vin, leur blé et leur huile !
- Heureux les riches qui boiront à la même coupe que les pauvres ! ont répondu les convives. Les cœurs dé­bordaient de joie, comme le vin des coupes. Après le silence de la dégustation, Lévi a prié les convives de lever leurs coupes aux cris de « Alléluia ! », pour porter un toast à la santé des époux.

Alléluia ! Alléluia !

Frères, buvez au bonheur des époux,
d’un cœur sain et joyeux,
sans avoir crainte du divin courroux.

Que les enfants de nos grandes familles
prennent la coupe de la main des pères ;
les jeunes filles égaient leurs mères,
tous nos garçons soient épris de nos filles.

Pauvres et riches, nous serons heureux
comme les gouttes de ce vin nouveau
qui coule du tonneau.
Aux époux du bonheur
dans la gaieté du cœur !
Alléluia ! Alléluia !


Nous arrivions à la fin du repas. Nous dégustions des gâteaux de miel et d’amandes, et savourions le vin doux fait avec des raisins secs. Les convives ras­sasiés étaient en pleine euphorie, ivres de vin et d’un enthousiasme quasi mystique. Jésus s’est alors levé. « Frères, en cette fin de journée, écoutez notre chant nuptial. Que l’Alliance de Dieu ne soit pas scellée dans des rouleaux ou sur des pierres, mais dans le cœur de ceux qui aiment ! Que l’amour de Dieu ne se manifeste plus sur la terre par des exploits hu­mains et par des guerres, par l’édification de villes ou de temples, mais par notre amour ! Notre cœur sera désormais le seul lieu où Dieu exaucera le ciel, où le ciel exaucera la terre. Que notre chant magnifie cette plénitude ! »

   Puis, me prenant la main, il m’a conduite au milieu du jardin et nous avons chanté.

Alléluia ! Alléluia !
Gloire au Seigneur au déclin de
[ce jour,
Louange à Dieu dans la gaieté
[d’amour.  
Le Seigneur a voulu que je t’épouse,
Parabole du peuple qu’Il jalouse ;
Je t’appelle, Maria, à cet honneur,
T’ayant aimée du profond de mon cœur.
Alléluia ! Alléluia !
Gloire au Seigneur au déclin de
[ce jour,
Louange à Dieu dans la gaieté
[d’amour.  
La fille d’Israël prend goût au ciel
Comme l’abeille à la douceur du miel ;
Je cours, Jésus, au cri de ton désir
Pour devenir selon ton bon plaisir.
Alléluia ! Alléluia !
Gloire au Seigneur au déclin de
[ce jour,
Louange à Dieu dans la gaieté
[d’amour.  
Étoiles, vous qui brillez dans la nuit,
Toi aussi, soleil, qui veilles le jour,
Regardez s’il y a un autre amour
Semblable à celui qui nous unit.
Alléluia ! Alléluia !
Gloire au Seigneur au déclin de
[ce jour,
Louange à Dieu dans la gaieté
[d’amour.  
Amour, exauce le désir des cieux !
Amour, réponds aux plaintes de la terre !
Amour, dissipe la haine et la guerre !
Amour, unis nos cœurs, rends-nous heu-
[reux !  
Alléluia ! Alléluia !
Gloire au Seigneur au déclin de
[ce jour,
Louange à Dieu dans la gaieté
[d’amour.  

   Tandis que les disciples applaudissaient, Jésus prit congé : « Continuez à vous réjouir et à vous rassasier de bonheur, mon épouse et moi nous nous retirons. À toi, Salomé, d’entrer en scène, toi qui possèdes l’esprit du chant et de la joie. »


Salomé libéra ses cheveux, se saisit du tambourin et dansa, s’écriant « Alléluia ! Alléluia ! ». Puis elle chan­ta, face à l’assemblée :

Fleur de lavande,
Que ta parole soit très douce et tendre
Comme à sa bouche la pulpe d’amande ;
Que tu puisses toujours bien comprendre
Ce que son cœur en son désir demande,
Fleur de lavande !

   Elle s’adressait particulièrement à moi. Avertie du cœur féminin, elle exprimait sa tendresse à mon égard et, avec délicatesse, s’appliquait à démontrer mon amour à Jésus. Nous quittions la maison de Lévi quand elle a entonné une autre strophe, pour elle, cette fois :

Ô belle tubéreuse,
Tu m’as choisie comme fidèle épouse
En me voyant de toi très amoureuse.
Puisque je serai toujours heureuse
Pourrai-je devenir femme jalouse ?
Ô belle tubéreuse !

   Au seuil de la porte, Salomé a chanté une dernière strophe, qui faisait allusion à ma place dans la para­bole de l’amour de Dieu :

Fleur d’immortelle.
Femmes qui désirez être très belles
Suivez-moi sur le chemin de l’amour,
Qui vous amènera dans le séjour
Où vous vous trouverez toujours nouvel-
[les,  
Fleur d’immortelle !

   Un moment, j’ai encore entendu le battement du tambourin, puis la voix de Salomé s’est perdue dans l’écho lointain du souvenir.




Roman achevé en 2002




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