ANALYSE RÉFÉRENTIELLE
ET ARCHÉOLOGIQUE
Pierre Curie
Le roman inachevé d’un utopiste
Tourcoing (1960-1967) :
expériences nouvelles
Sommaire
Prologue
Introduction
Clermont-l’Hérault
Saint-Quentin
Bruay-en-Artois
Tourcoing
-
Introduction
-
Le protestantisme
à
Tourcoing
-
Communauté
vivante
-
Sensibilisations
-
Parole
d’utopie
-
L’impasse
-
Recherche
de structures
nouvelles
-
Expériences nouvelles
.
Tournant
théologique
.
Tournant
œcuménique
.
Le groupe
œcuménique
.
Le groupe pour la paix
-
Introduction
-
La force
de frappe
-
Premier
colloque sur le
Vietnam
-
Audience
du maire
-
Caravane
pour le
Vietnam
-
Second colloque
-
Le Moyen-Orient
-
L’arme
atomique
.
Le groupe
de recherche
biblique
-
Vers
la crise
La crise
Épilogue
. . . . . . . . - o
0
o - . . . . . . . .
Le groupe pour la paix :
le second forum sur le Vietnam
En 1967, la situation au
Vietnam s’était aggravée. La population du
Nord était soumise aux bombardements américains incessants les plus intensifs, elle subissait les horreurs du napalm, et les plantations les ravages des défoliants ; les soldats vietnamiens capturés étaient torturés, souvent abattus sur place.
«
Pourquoi et comment amener les
Américains à cesser ces bombardements aveugles, à négocier et à retirer leurs troupes, bref à engager l’escalade de la paix au
Vietnam au lieu de poursuivre une guerre qui menaçait de dégénérer en conflit majeur, voire mondial ?
» Telle fut la question que le groupe pour la paix envisagea de poser dans un second colloque
(1)
au début de l’année 1967.
Trois orateurs furent contactés qui, dans un premier temps, donnèrent leur accord :
la cinéaste Madeleine Riffaud, le journaliste de
L’Observateur
Claude Bourdet, et le
R.P. Robert.
Le ciel et la terre
, film de
Joris Ivens, devait également être projeté au cours de cette soirée publique. Malheureusement, en dernière heure, ces trois personnalités ne purent pas se déplacer à
Tourcoing et le groupe pour la paix
(2)
ne put faire appel qu’à un seul orateur, M.
Charles Fourniau, attaché de recherche au CNRS et secrétaire des Amitiés Franco-vietnamiennes, qui avait été témoin entre 1963 et 1965 des bombardements américains au
Nord-Vietnam.
Cette nouvelle conférence-débat, tenue le douze avril 1967, elle aussi à la salle des fêtes des Hospices de
Tourcoing, ne connut pas l’affluence des forums précédents. Néanmoins, grâce à trois quotidiens régionaux (
La Voix du Nord
,
Nord-Eclair
et
Liberté
), la population des
Flandres put en recevoir l’écho.
«
Une trentaine de personnes seulement avaient répondu à l’invitation
», rapporta
La Voix du Nord
. «
Une trop maigre assistance
» pour
Nord-Eclair
.
«
Devant une assistance attentive et profondément consciente de l’horreur de l’agression américaine et des lourdes menaces qu’elle fait peser sur la paix du monde
– écrivit pour sa part le quotidien communiste
Liberté
–
le professeur Fourniau expliqua tout d’abord pourquoi chacun devait lutter dans son quartier, son usine ou son entreprise
».
Nord-Eclair poursuivit
: «
M. Charles Fourniau devait présenter un vibrant plaidoyer. Son témoignage était d’autant plus fort
qu’il avait séjourné plusieurs mois au
Nord-Vietnam et
qu’il s’était personnellement trouvé sous les bombes américaines peu après le déclenchement de l’escalade. Comment les hommes de bonne volonté pourraient-ils dormir tranquille,
lança-t-il d’emblée, quand à douze-mille kilomètres le napalm et le phosphore blanc brûlent hommes, femmes et enfants ? Il faut mobiliser l’opinion publique pour éviter coûte que coûte le déclenchement d’un conflit mondial dont les éléments constitutifs se trouvent maintenant rassemblés au
Vietnam
».
«
Il rappela,
précisa
Liberté
,
que selon une enquête d’un professeur américain, un million d’enfants du
Sud-Vietnam auraient été victimes de la guerre depuis le début de l’intervention américaine.
Il souligna que le
Vietnam est le seul pays à avoir été obligé de faire disparaître les Croix Rouges d’au-dessus des hôpitaux pour éviter qu’ils ne soient bombardés
».
Soulignant l’énorme responsabilité des
États-Unis, qui avaient violé les accords de
Genève en empêchant les élections en 1956 et en soutenant totalement le régime de
Saïgon,
Charles Fourniau poursuivit : «
Comment pourrait-on mettre sur le même plan le
Vietnam qui défend sa vie au sens biologique du terme et son unité nationale, et les
États-Unis qui poursuivent une politique impérialiste en agressant ce peuple à douze-mille kilomètres de leurs côtes ?
»
«
Enfin,
il fit l’inventaire,
releva
La Voix du Nord
,
des solutions de paix qui sont : la reconnaissance du Front national de libération afin d’avoir un interlocuteur valable ; la cessation des bombardements, et l’engagement du retrait ultérieur des troupes étrangères
». «
M. Fourniau,
précisa
Nord-Eclair
,
se dit convaincu de la volonté sincère de paix des
Nord-Vietnamiens et de leurs dirigeants
qu’il connaît personnellement. L’opinion publique internationale,
ajouta-t-il, possède une grande puissance et a un rôle à jouer. Nous ne pouvons pas rester dans nos pantoufles tant que meurent des hommes, des femmes et des enfants
».
Après l’avoir annoncée au cours de la conférence, le groupe pour la paix s’associa dans les semaines suivantes à la collecte du « Milliard pour le
Vietnam », destinée à venir en aide aux victimes des bombardements. Cent-mille anciens francs (environ six mille francs actuels)
(3)
furent collectés dans
Tourcoing et adressés à la Croix-Rouge nord-vietnamienne.
Enfin, le vingt-et-un octobre 1967, le groupe pour la paix ouvrit toute la journée un stand sur la Grand’ place Charles Roussel de
Tourcoing, invitant les passants à signer en solidarité avec les pacifistes américains un livre d’or, qui leur fut ensuite envoyé en témoignage de soutien à leur lutte pour le rétablissement de la paix au
Vietnam.
______________
(1) Pour le premier colloque,
voir
.
(2)
Voir
la présentation du groupe pour la paix.
(3) Valeur 1992.
1992
tc437450 : 27/07/2019