ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


                              Auteurs Méthode Textes
  Plan Nouveautés Index Liens Aide





Ennio Floris



Chronique  de  Marie-Madeleine



Roman





Chapitre 13 - Béthanie :

Pâque



Magnum Dictionarium latinum et gallicum, de P. Danet, MDCXCI





Présentation


Texte intégral :

La rencontre d’amour

Les disciples du Royaume

Le banquet des noces

Itinéraire d’un bâtard

Le défi

La fugue

Sur le pont du bateau

Chemins d’amour

Dalmanutha

Transfiguration et insurrection

La Dédicace

Correspondances

Béthanie
- Le second amour
- Sous le signe de Jonas
- Pâque
- L’onction
- Le baiser
- Adieu

Gethsémani

Le procès

Golgotha

L’enterrement

Le jour de la Pâque

Le tombeau vide

Les semeurs


arvenue à cet ancien pressoir transformé en habi­ta­tion, dans un coin de l’oliveraie du Mont des Oli­viers, j’ai compris le choix de Simon : cette maison permettrait à Jésus de rester à l’abri de toute indis­cré­tion et lui offrirait la possibilité de s’enfuir à travers bois en cas d’alerte. J’ai aménagé les lieux pour la réception du soir.


Il faisait déjà sombre quand les disciples sont arrivés, apeurés et sur leurs gardes. Jésus leur a dit :
- Frères ! Comme vos sœurs le savent déjà, j’ai ar­dem­ment désiré manger la Pâque avec vous, mais les circonstances m’en empêchent. Cependant, si nous ne pouvons pas manger la Pâque, nous pou­vons mieux faire : l’accomplir.
- Tu nous parles de façon énigmatique, Maître, ré­pondit Judas. Comment pourrons-nous accomplir la Pâque, si nous ne mangeons pas l’agneau et le pain azyme ? Je m’étonne aussi que tu aies pu désirer ar­demment manger la Pâque, si tu es convaincu du re­jet d’Israël !
- Je l’ai désiré pour exprimer sa signification primiti­ve : la commémoration du passage de la Mer Rouge. Mais j’entends aussi l’accomplir au sens nouveau que lui donne mon départ : si je pars, ce n’est ni par plaisir ni par peur, mais pour parvenir au sens qui de­meure caché dans cette fête. Notre peuple n’a pas été guidé par Moïse à travers la Mer Rouge et le dé­sert pour devenir une grande nation, mais pour ap­pe­ler les nations à la reconnaissance de Dieu et les ré­concilier dans l’unité de la conscience humaine. Or, puisque Israël a failli à sa mission, la Pâque reste en­core à accomplir : les Juifs doivent renoncer à leur vocation de nation privilégiée pour devenir un peuple au service des nations, en vue de la réconciliation des hommes selon l’ordonnance de Dieu au jour de la cré­ation.
« Mon départ en marque le début, pour que les hom­mes se découvrent à nouveau frères. Si nous l’ac­com­plissons ainsi, la Pâque deviendra l’unique évé­ne­ment capable d’effacer les divisions et la guerre qui se sont installées dans le monde depuis la tour de Babel. Le rite devient caduc, car la Pâque n’est pas un fait accompli, mais un événement à venir ; nous ne devons pas la commémorer mais la réaliser. Com­me nos pères, nous sommes en fuite, chassés de notre terre, menacés dans notre existence. Nous som­mes en marche, en transit...
- L’évocation de la persécution de Pharaon est op­portune, Maître, mais de là à accuser les responsa­bles de la nation de vouloir tuer nos aînés !
- Certes, les fils du peuple de Dieu naîtront désor­mais de la nouvelle alliance d’amour, mais les res­ponsables de la nation chercheront aussi à les faire pé­rir, comme ils tentent de me tuer pour m’empêcher de proclamer cette alliance. Aussi, je veux offrir comme un signe l’enfant qui naîtra de mon union avec Maria, parabole de cette alliance, afin que vous résistiez à la persécution et que vous vous engagiez dans l’amour. La conception et la naissance de cet enfant marqueront le début de la nouvelle Pâque.
- Un enfant ? s’écrièrent-ils d’une seule voix. Maria est enceinte ? Alors qui seront les fils de Dieu : nous, qui croyons à ta parole, ou ton enfant ?
- Pourquoi vous laissez-vous subjuguer par des ques­tions de prestige et par la jalousie ? Mon enfant sera le premier né de tous ceux qui naîtront de la nouvelle Pâque. Soyez sans crainte, frères, lors de la première Pâque, bien des femmes ont traversé la Mer Rouge en portant leur aîné dans leur sein. Maria sera la pre­mière de la nouvelle Pâque, car l’enfant qu’elle porte sera sauvé de la persécution.

   J’ai observé Judas : il s’était caché le visage dans les mains, pour montrer qu’il ne pouvait en croire ses yeux ; puis il laissa paraître un visage écarlate : « Si je m’attendais à cette nouvelle, Maître ! Tu t’es lais­sé dominer par la convoitise d’une femme ; je re­dou­tais bien qu’en liant ton message à l’amour d’une fem­me, elle ne te rabaisse au rang d’un homme or­di­naire. »

   Il s’était exprimé sans regarder Jésus, comme s’il se parlait à lui-même, mais en réalité il s’adressait à moi, il me disait qu’il avait gagné son pari. J’aurais ai­mé lui répondre, mais j’ai laissé Jésus le faire.
- Certes, je me suis laissé vaincre par une femme, comme Dieu Lui-même s’est laissé émouvoir par le désir de Sara, de Rébecca et de Rachel, qu’Il a ren­dues fécondes, mais aussi de Gomer, qu’Il a donnée pour épouse à Osée et qui a mis au monde des en­fants bâtards.
- Cependant, quand tu as épousé Maria, n’avais-tu pas renoncé à avoir des enfants ?
- Penses-tu qu’avoir des enfants rende le mariage in­digne d’un prophète et du message de Dieu ? Maria et moi avions décidé de ne pas avoir d’enfant, car notre union visait moins la procréation que la repré­sentation en parabole des noces de Dieu avec son peuple. Maintenant, nous signifions que l’enfant qui naîtra de notre mariage sera fils de Dieu.
- Alors, comment te comporteras-tu avec Maria ? de­manda Céphas. Vas-tu la répudier pour la reprendre ensuite, ou prendras-tu une étrangère, comme Moï­se ?
- Non, Céphas ! Je n’ai pas l’intention de divorcer, mais notre mariage prendra la signification nouvelle de la Pâque, celle de l’alliance que Dieu a promis d’établir avec tous les peuples de la terre. Il passera de l’alliance du Sinaï à celle de la création. Maria, dont le nom est d’origine égyptienne, évoque à la fois la femme des nations et la fille d’Israël. Elle est l’ai­mée, son nom l’exprime, comme Ruchama était la graciée.
- Je crois comprendre, a dit Jean, que la célébration de la nouvelle Pâque s’accomplira dans le renouvel­lement de ton mariage, afin que vous figuriez le nou­veau couple de l’alliance de la création.
- Exactement, mais vous aurez part, vous aussi, à la célébration. Rappelez-vous le rôle que vous avez joué lors de mon premier mariage : vous étiez les amis de l’époux, l’image du peuple. Vous êtes tou­jours amis de l’époux, vous serez aussi image des nations.




Roman achevé en 2002




Retour à l’accueil Sous le signe de Jonas Retour à la table des chapîtres L’onction     Choix de l'impression

t321349 : 09/10/2020