ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



Chronique  de  Marie-Madeleine



Roman





Chapitre 18 - Le jour de la Pâque :

La nouvelle alliance



Lettere a Mons. Pietro Bembo, 1560 





Présentation


Texte intégral :

La rencontre d’amour

Les disciples du Royaume

Le banquet des noces

Itinéraire d’un bâtard

Le défi

La fugue

Sur le pont du bateau

Chemins d’amour

Dalmanutha

Transfiguration et insurrection

La Dédicace

Correspondances

Béthanie

Gethsémani

Le procès

Golgotha

L’enterrement

Le jour de la Pâque
- L’aube
- L’énigme de la mort
- Le chant du Serviteur de
  l’Éternel
- Oint par une femme
- La nouvelle alliance
- Le repas pascal

Le tombeau vide

Les semeurs


acques, gêné par le tour que prenait le débat, est in­tervenu :
- Cela me serait impossible, frère, si je devais l’at­tendre comme le Seigneur. S’est-il humilié pour être exalté ?
- As-tu oublié, Maria, ce que nous venons d’entendre de la bouche de Salomé ? " C’est pourquoi je lui don­nerai sa part avec les grands, il partagera le butin avec les puissants ". Oui, Dieu exaltera celui que les hommes ont abaissé, Il glorifiera le Serviteur que les hommes ont humilié.
- Frères vous avez recours, pour comprendre Jésus, à des images que vous dites avoir trouvées dans les Écritures ; mais comment interprétez-vous les Écritu­res ? Ne voyez-vous pas que vous en tirez un modèle du Christ qui renvoie l’écho de la grandeur et du pouvoir qui dominent le monde ? Vous faites Sei­gneur celui qui a refusé d’être appelé Maître ! Dieu donnerait la puissance au Serviteur envoyé dire aux hommes qu’il n’est plus Baal, le Maître, mais l’a­mant et l’époux ? Judas a été plus franc et plus hon­nête, lui qui avait la même image du Christ et qui a osé dé­noncer Jésus parce qu’il jugeait qu’il la con­tre­disait. Jésus ne recevra d’autre gloire que celle de person­nifier l’amour qui lui a coûté la vie. Le grain de blé n’a d’autre gloire, en mourant sous terre, que de de­venir plante et épi : ce sera notre destinée, si la mort de Jésus germe en nous.
- Moi aussi, a appuyé Salomé, j’ai fait la même expé­rience. Invitée à monter au Golgotha, j’y ai vécu la mort de Jésus comme l’événement de l’amour, et non comme la sentence de la justice. Nous en avons tous été témoins ; nous nous sommes serrés les uns contre les autres, pour former un seul corps où cette mort a pénétré comme une semence de vie. Nous avons éprouvé le sentiment de naître comme enfants de Dieu. Porteurs de cette semence, nous devons main­tenant aller de par le monde la répandre dans le cœur des hommes.


Mes frères, ne sachant que répondre, baissaient les yeux, pensifs et tourmentés. Je me suis sentie bien seule, mais réconfortée d’avoir pu rendre témoignage à l’amour qui donnait sens à la vie et à la mort de Jésus. Venant de la chambre à côté, nous avons vu entrer dans la salle Simon, suivi de Joseph. Sa lettre m’est revenue en mémoire et, pleine de joie, j’ai pris la main de Salomé et nous sommes allées à sa ren­contre. Les deux amis nous ont embrassées, en salu­ant les frères de loin.

« Frères, a dit Simon, nous nous excusons d’inter­rompre votre conversation, mais nous pensons qu’elle en est à un point où notre présence est né­ces­saire. Nous sommes là depuis le commence­ment de votre dispute, mais nous n’avons pas voulu inter­venir. Je vous présente Joseph, mon vieil ami d’­Ale­xandrie, devenu aussi l’ami de Maria. Il a res­senti très vivement la fin de notre Maître, qu’il re­grette de ne pas avoir connu personnellement. Rece­vez-le com­me un frère. »

   Les disciples se sont approchés pour l’embrasser. Ému, mais serein, Joseph a pris la parole : « Il n’est pas nécessaire que je me présente ; cette tâche re­vient à Maria, qui connaît un peu ma vie et ma pensée. Te souviens-tu, Maria ? J’étais préoccupé, comme tout Israélite de la diaspora, par l’accomplis­sement des promesses de Dieu à Abraham : la pa­ternité divine élargie à toutes les nations par la mé­diation d’Israël. Mais contrairement à l’opinion cou­rante, j’étais convaincu que Dieu l’accomplirait par l’humiliation, et non par l’exaltation de notre peuple, selon ce que j’avais lu au livre d’Osée et la consta­tation que tous ceux que Dieu a appelés à répandre l’amour dans le monde ont été humiliés. Cette con­viction s’est renforcée en étudiant le chant du Ser­viteur de l’Éternel, mais aussi les mythes sur l’avè­nement de l’amour chez les Grecs, ceux de Dionysos et de Prométhée.
« C’est pourquoi, Maria, j’ai été très attentif et rempli de crainte quand tu m’as fait part de l’in­tention de Jésus. Mais je ne t’avais pas tout dit : dans ma famille on conserve, depuis des générations, une glane d’épis que nous croyons nous avoir été confiée par notre père Joseph. " Asnath, aurait-il dit à sa fem­me avant de mourir, prends ce bouquet d’épis que mes frères m’ont rapporté en mémoire du blé que je leur avais donné dans le temps de famine. C’est du blé égyp­tien, poussé au pays d’Israël et re­venu dans sa terre d’origine. Tu donneras cette glane à mes enfants, afin qu’ils la sèment lors de l’ac­complissement des pro­messes de Dieu sur l’unité des peuples. Ils jetteront ces grains de blé en terre quand les fils d’Israël livre­ront à nouveau leur frère à la puissance des nations ". Maria, Salomé, frères, j’ai la certitude maintenant que Jésus, en mourant, a ac­com­pli ce signe. »

   Tout en parlant il a tiré de son sac une gerbe de quatre-vingt-quatre épis et l’a déposée entre mes mains. Alors Salomé, s’approchant de moi, m’a de­mandé de lui confier la glane et, l’élevant, s’est écriée en dansant : « C’est l’une des glanes que j’ai ramas­sées derrière les moissonneurs, dans les champs de Capharnaüm. Par ces épis, j’ai trouvé l’amour, et par ces épis nous nous sommes reconnus frères ! »




Roman achevé en 2002




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t321873 : 29/10/2020