ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



La  rupture  cartésienne  et  la  naissance
d’une  philosophie  de  la  culture
dans  les  œuvres  juvéniles  de  J.-B.  Vico





Les  Discours  (1689-1717)



5-  La  politique  du  pouvoir
et  la  politique  de  l’autorité



Si l’on veut retirer la plus grande utilité des études littéraires, il convient qu’elles soient poursuivies avec honnêteté pour le bien commun des citoyens (1).




56- La cognation et l’agnation :
la première rencontre de Vico
et de Grotius



Profil biographique de Jean-Baptiste Vico


INTRODUCTION


LES DISCOURS

Vico orateur

La connaissance de soi et la divinité de l’homme

Conscience éthique et conscience historique

La morale des intellectuels

La politique du pouvoir et la politique de l’autorité
De l’éthique à la politique
La classe dirigeante
La Patrie, fondement de l’unité
  de la culture
L’utile et l’honnête
Hobbes, Machiavel et la
  politique du pouvoir
Cognation et agnation :
  première rencontre de Vico
  avec Grotius

Idéalisme et réalisme vichiens

Le droit de la guerre et la sagesse du Droit

La corruption de la nature et la méthode des études

La rhétorique des Discours et le projet philosophique de J.-B. Vico


DE NOSTRI TEMPORIS STUDIORUM RATIONE

Vue d’ensemble

La controverse des Anciens et des Modernes et la conscience historique

La nouvelle science

La controverse des langues

Langue et méthode

Le vraisemblable et le sens commun

Le « cogito » cartésien et l’interrogation vichienne du doute

Logique analytique et logique synthétique

Métaphysique et mathématiques


DÉMARCHE POUR UNE PENSÉE CRÉATRICE



BIBLIOGRAPHIE


La logique ou l’art de penser, de Nicolle et Arnauld, 1664 a théorie du Droit naturel que Vico oppose au positivisme de Machiavel et de Hobbes s’apparente au jus-naturalisme de Grotius. Parler d’une influence du philosophe hollandais dans cette première période de la pensée vichienne pourrait paraître surprenant puisque, selon l’Autobiographie, Vico aurait lu le De jure belli et pacis seulement au moment de la com­position de la biographie de A. Carafa, qui re­monte à la période postérieure du De antiquis­sima (16). Puisqu’il avait décidé d’en entreprendre un commentaire, il semble qu’il avait fait une pre­mière lecture de l’ouvrage. En effet, la conception du droit naturel qui apparaît dans ses Discours s’apparente à celle de Grotius.

Soulignons, tout d’abord, que la démarche de Grotius est analogue à celle de Hobbes, puisqu’il cherche à comprendre le droit naturel en se réfé­rant au premier état de l’homme. Leur perspective est cependant différente. En effet, Hobbes retrou­ve ce premier état dans l’âge préhistorique, tandis que Grotius le recherche par un procédé juridico-philosophique qui apparaît comme un postulat ra­tionnel du droit.
   Son argumentation est double. A posteriori, à partir des différents droits positifs, il constate que le droit romain ne déclare pas ennemis les peuples avec lesquels Rome ne se trouvait ni en état de guerre, ni en relation d’amitié. Cela impliquait entre eux une relation de non agressivité, compor­tant la reconnaissance d’un droit de nature. Au lieu de se trouver dans un état naturel de guerre, les hommes par nature sont liés par une relation de parenté (cognatio) qui, sans les associer con­crètement, leur défend de se nuire.
   A priori, ce droit naturel s’identifie aux normes suprêmes de la raison, ainsi qu’avec cet ordre que Dieu a établi, selon les Écritures, au moment de la création, de la nouvelle création après le déluge, enfin du salut par le Christ (17).

La théorie générale du droit naturel qu’il a héritée directement de la tradition humaniste rapproche moins Vico de Grotius que le fait qu’il reconnaît un état de parenté pré-juridique entre les hommes. Cependant, le mot par lequel les deux philosophes expriment cette parenté est différent : pour Gro­tius, il s’agit d’une cognation, pour Vico d’une agnation (18).
   Cette différence est très importante. En effet, l’agnation est la parenté constituée en ligne mascu­line par l’autorité du père, qui en droit romain reconnaissait le nouveau-né pour son enfant et héritier par l’imposition de sa main. La cognation, au contraire, désigne la descendance en ligne ma­ternelle, par les filles.

Au temps de Justinien seulement, l’agnatio a cé­dé la place à la cognatio (19), les deux expressions devenant pratiquement synonymes, bien que sé­mantiquement elles aient gardé leur signification propre, surtout dans les domaines non juridiques. Cela incite à comprendre la même théorie du droit naturel chez Grotius et Vico selon une optique différente. Pour Grotius, la fraternité entre les hommes est fondée sur la descendance physio­logique. Dieu n’est pas exclu, il intervient comme créateur dans l’acte de génération lui-même.
   Pour Vico, au contraire, la fraternité humaine n’est pas liée nécessairement à la génération. On est frère, en effet, par une intervention spéciale de Dieu, dans la mesure où, à la naissance, il nous choisit comme fils et héritier de sa propre divinité. La loi naturelle correspond donc, non à la nature physique des hommes, mais à leur nature idéale qui est éthicité pure (20).
   En d’autres termes, le droit naturel se fonde non sur le sang et sur la chair, mais sur la parole de Dieu, que Vico découvre inscrite dans les my­thes. Grotius est déjà entré dans la période de l’illu­mi­nisme, tandis que Vico la dépasse. Sans doute res­te-t-il attaché à la conception pichienne selon la­quelle l’homme existe par l’acte de sa pro­pre liber­té. Sa position lui permet de ne pas rejeter entiè­rement la théorie de Hobbes, puisqu’il a pu s’ap­proprier la notion d’état de guerre primitif sans lui donner une valeur juridique. Cet état de guerre ne constitue pas la véritable humanité : hommes, ils le deviendront lorsque dans le mythe ils décou­vriront qu’ils sont fils de Dieu.




Thèse soutenue le 22 juin 1974




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t311560 : 27/10/2018