Profil biographique de Jean-Baptiste Vico
INTRODUCTION
LES DISCOURS
Vico orateur
La connaissance de soi et la divinité de l’homme
Conscience éthique et conscience historique
La morale des intellectuels
La politique du pouvoir et la politique de l’autorité
Le droit de la guerre et la sagesse du Droit
La corruption de la nature et la méthode des études
. Nécessité d’affranchir les études
. La nature corrompue et le péché des parents
. La réforme de la nature
. L’univers des arts et des sciences
. Le schéma pédagogique
. Les deux schémas de Vico et l’encyclopédie baconienne
. Avènement de l’homme et événement de la culture
La rhétorique des Discours et le projet philosophique de J.-B. Vico
DE NOSTRI TEMPORIS STUDIORUM RATIONE
Vue d’ensemble
La controverse des Anciens et des Modernes et la conscience historique
La nouvelle science
La controverse des langues
Langue et méthode
Le vraisemblable et le sens commun
Le « cogito » cartésien et l’interrogation vichienne du doute
Logique analytique et logique synthétique
Métaphysique et mathématiques
DÉMARCHE POUR UNE PENSÉE CRÉATRICE
BIBLIOGRAPHIE
|
uisque la corruption de la nature n’est qu’une errance, il s’ensuit que les hommes peuvent se corriger (emendare) par eux-mêmes dans une prise de conscience de leur propre liberté d’existence. Celle-ci, qui leur avait permis de s’éloigner de l’alliance de Dieu, leur donne le pouvoir d’y revenir. Leur salut est le retour à cette humanitas dont ils s’étaient séparés. Ils y parviennent par le moyen des trois arts : la science, l’éloquence et la prudence, qui s’opposent l’une à l’opinion, l’autre à l’enfance, la troisième aux passions (6).
Ces trois disciplines – science, éloquence et prudence – sont en correspondance avec le triple égarement de la mens, du sermo et de l’animus. Ainsi, tandis que Descartes ne trace que le seul chemin de la méthode, par lequel l’entendement (mens) va de l’opinion à la vérité, Vico en indique trois. Sans doute Descartes est-il logique, puisque ayant défini l’homme par la pensée pensante, il lui suffit pour le retrouver de suivre le chemin de l’évidence. Cependant, Vico est également cohérent avec ses prémices, puisque, pour lui, l’homme est une trilogie (mens, animus et sermo) au sens de sujet de pensée, d’action et de parole. De même que sa dispersion dans la matérialité de l’anima touche aux trois niveaux, de même la libération ne peut être réalisée que par les trois voies qui conduisent l’homme à la « vérité » de l’entendement, à la « dignité » de la parole et à la « rectitude » de l’action. La vérité, la dignité et la rectitude sont précisément les éléments constitutifs de l’humanitas.
Évitant toute rupture, il apparaît que Vico, par toutes ses approches et ses ouvertures, ne fait que se conforter davantage dans son humanisme. Pic de la Mirandole avait parlé d’une triple voie de salut par la culture, fondé sur la science morale, la dialectique et la philosophie (7).
Reconnaissant que la méthode cartésienne n’est définie que par la vérité, Vico l’inscrit sans peine dans le champ de la philosophie pichienne, sans éprouver le besoin de la contester en elle-même. La science morale et la dialectique de Pic de la Mirandole sont assimilées par lui, l’une à la prudence, l’autre à l’éloquence. Par sa trilogie, il cherchait donc à se rattacher au pichisme pour hériter de la tradition humaniste.
Nous pouvons aisément retrouver trois des grands axes de l’humanisme : la philosophie, le courant éthico-juridique et la tradition philologico-rhétorique. Cette même trilogie lui sert d’assimilation des courants nouveaux, avant tout le cartésianisme, qui semble trouver sa place au niveau le plus haut du triangle. Il adhéra donc au cartésianisme, dans la mesure où celui-ci se laissait attirer par l’humanisme. Il était prêt à suivre Descartes sur la voie de l’évidence, pourvu qu’il renonce à couvrir par sa méthode les domaines de l’action et de la parole.
Naturellement, il s’est vite aperçu que Descartes n’était pas un philosophe à se laisser tenir en laisse, fut-ce par l’humanisme. Alors est venu le moment de l’exclure par une critique aussi radicale que respectueuse du grand auteur. Pour l’heure, on pouvait croire que Vico avait conscience d’être parvenu à recomposer l’unité de la culture. L’appel à la connaissance de soi lui a servi à nouer le fil rompu du discours européen.
|