ANALYSE RÉFÉRENTIELLE |
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Ennio FlorisLa rupture cartésienne et la naissance
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Le De nostri temporis studiorum ratione (1708)8- Logique analytique et logique synthétique |
87- La méthode |
Profil biographique de Jean-Baptiste Vico
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ntroduite dans la Logique comme quatrième opération de l’esprit, la méthode a joué, en réalité, un rôle bien plus important, car au lieu de succéder aux autres opérations, elle les a assumées à un niveau différent. Arnauld s’était excusé initialement auprès du lecteur de traiter dans cette quatrième partie de problèmes propres aux trois premières, mais il ne pouvait pas faire différemment. Cette quatrième partie a constitué à elle seule une autre logique, transposant les trois fonctions du niveau formel au niveau matériel de la recherche de la vérité. Vico s’était aperçu de son ambivalence, et il dénonça le fait qu’elle vidait les autres opérations, alors qu’elle aurait dû les coordonner. C’est pourquoi il l’a soumise à une critique serrée. Avant tout, il lui a dénié la fonction d’invention qu’Arnauld avait considérée comme fondamentale. Rappelons que, pour Descartes, l’invention s’était identifiée avec la déduction. Par ce mot, il n’avait entendu que l’enchaînement des intuitions, dans la mesure où elles se succédaient sans solution de continuité au niveau de l’expérience. Pour ne s’en tenir qu’au strict sens étymologique, le mot « déduction » serait impropre, parce que cet enchaînement présente les caractéristiques d’un point en mouvement, plutôt que celles d’un processus d’inférence. À cet égard, Vico ne s’est pas privé de retourner contre la méthode les accusations d’inutilité, de facilité et de danger pour la science qu’Arnauld avait lancées contre l’invention topique. Lui ayant ôté l’invention, il ne restait à la méthode que sa fonction analytique. Mais après avoir reconnu que l’analyse est fonction du jugement, Vico a été contraint de lui dénier aussi cette fonction, pour l’attribuer à la critique comme logique de jugement. Enfin il lui restait le rapport d’inférence d’une vérité à l’autre, déduisant, comme le dit Vico, « verum de vero ». Mais pour lui, cette fonction faisait aussi partie du jugement car elle n’aboutissait qu’à des affirmations de vérité. Il ne restait ainsi à la méthode que d’être une règle de la « disposition » des jugements dans le discours. Elle n’avait d’autre fonction que didactique (46). À ce point, il convient de noter que la critique de Vico visait la méthode tout autant que la Logique. Non seulement il a nié que la méthode soit argumentation, mais il a refusé de considérer l’argumentation comme la troisième opération de l’esprit, parce qu’elle était pour lui le jugement lui-même. À la place de la troisième opération de la logique formelle, Vico a mis cette opération de « disposition » qui était la quatrième dans la Logique d’Arnauld. Mais si l’on se souvient que la « disposition » était la troisième fonction de la logique cicéronienne, on constate que, dans toute sa démarche logique, Vico n’a fait que réduire la logique formelle à la logique cicéronienne dans le cadre de la critique de la méthode. Au terme de cette entreprise, je me limiterai à deux remarques au sujet de la méthode et de la logique cicéronienne. À la méthode, Vico n’a reconnu qu’une fonction didactique, puisqu’il l’a conçue comme l’art de disposer les jugements en discours. La fonction inventive et critique reconnue par Descartes, a été confiée à la topique et au jugement qui devinrent les fonctions fondamentales de la pensée. Mais pour que la méthode pût exercer cette fonction de « disposition » du discours, il fallait qu’elle puisse régler tous les jugements de la pensée, et non seulement ceux propres aux sciences. Pour Vico, chaque discipline avait sa propre méthode, selon la nature de son argumentation. Mais au niveau de la logique, il indiqua deux directions fondamentales représentées, l’une par l’argumentation scientifique, dont la géométrie restait le modèle, l’autre par l’argumentation de vraisemblance qu’il attribuait au « sens commun » : deux directions, ouvrant deux champs méthodologiques, permettant cependant à chaque discipline d’avoir une approche conforme à sa nature. Quant à la logique cicéronienne elle s’est affirmée, dans la reprise vichienne, comme fondatrice de la primauté de la synthèse sur l’analyse. Il apparaîtra peut-être étrange et même amusant de faire remonter au cicéronisme ce caractère synthétique de la pensée, que l’histoire de la philosophie nous avait habitués à reconnaître comme une création kantienne ! Mais si cette lointaine origine est véridique, comme je le pense, on comprendra pourquoi Vico, en dépit de Pic de la Mirandole et d’Érasme et malgré le vide du cicéronisme, l’a prise pour base de son projet philosophique. |
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t312870 : 25/09/2017