ANALYSE  RÉFÉRENTIELLE
ET  ARCHÉOLOGIQUE


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Ennio Floris



Chronique  de  Marie-Madeleine



Roman





Chapitre 1 - La rencontre d’amour :

Martha, ma soeur



Magnum Dictionarium latinum et gallicum, de P. Danet, MDCXCI





Présentation


Texte intégral :

La rencontre d’amour
- Au puits d’Agar
- Martha, ma soeur
- L’ombre de ma mère
- L’onction de l’époux
- Au jardin
- Ammi et Ruchama
- Pierre et Jean
- Nuit

Les disciples du Royaume

Le banquet des noces

Itinéraire d’un bâtard

Le défi

La fugue

Sur le pont du bateau

Chemins d’amour

Dalmanutha

Transfiguration et insurrection

La Dédicace

Correspondances

Béthanie

Gethsémani

Le procès

Golgotha

L’enterrement

Le jour de la Pâque

Le tombeau vide

Les semeurs


e retour à la maison, j’étais en pleurs. Mes bras tremblaient si fort que l’eau ballottait dans la cruche et que de grosses gouttes tombaient sur mes épaules. Je voulais savoir à tout prix si mes larmes jaillissaient de la même source que celles de Jésus... sinon pour­quoi pleurer comme lui ? Mon émotion s’accompa­gnait de la joie intense qu’on éprouve après avoir été libéré d’une angoisse, sans savoir comment. J’avais l’impression d’être délivrée du gouffre du péché, de la peine du péché qui corrode l’esprit et l’accable. Dans la chaîne du temps, le maillon unissant le pré­sent au passé s’était brisé, ouvrant le présent sur l’au­be d’un jour nouveau.



Lorsque Martha me vit, elle fut épouvantée :
- Que t’est-il arrivé, Maria ?
- Rien, ai-je balbutié ; je suis saisie d’une telle joie que j’en pleure, mon cœur est si réjoui que mes pa­roles ne peuvent pas exprimer ce que je ressens !
- Tu as dû rencontrer quelqu’un à la source...
- Oui, Martha, un homme qui a dévoilé la parabole de mon existence.
- Parabole ? Que signifie ce mot ? Où l’as-tu appris ? Était-ce un magicien ? Tu n’es plus une gamine : tu as l’expérience des hommes qui disent n’importe quoi pour séduire les femmes et rôdent autour des puits comme chiens en chasse.
- Rappelle-toi la parabole dont je t’ai déjà parlée : lorsque nous allons puiser de l’eau nous cherchons, sans même le savoir, l’homme de notre désir. Il ar­ri­ve que nous ayons la chance de le reconnaître, quand nous voyons que son image recouvre la nôtre au fond du puits. Alors l’eau s’agite et l’image saute à nos yeux, comme en se jouant. Te souviens-tu, Mar­tha, qu’un jour nous avons cherché à tenir dans une cuillère la lune qui se reflétait sur l’eau du bassin : nous voulions l’avaler comme une goutte de miel ! La lune s’échappait toujours de la cuillère et re­tom­bait dans l’eau... Cette fois, j’ai vraiment bu cette image avec l’eau, et elle a pénétré dans mon cœur.
- Tu es folle d’amour ! Mais laissons cette folie qui t’enlaidit ! Tu dois laver tes yeux, passer sur tes pau­pières de la crème de jasmin et rehausser l’éclat de tes lèvres avec du cinabre.
- Pourquoi tous ces soins maintenant ? Je n’ai pas l’intention de sortir et la crème ne pourrait pas effa­cer le rouge de mes yeux, car c’est de l’intérieur qu’ils brûlent !
- Ne parle pas de rester à la maison, alors que tu es invitée à danser au grand repas que Simon offre ce soir. La reine de beauté pourrait-elle manquer cette occasion ?
- Martha, n’insiste pas, mon cœur me le défend.
- Tu ne peux pas refuser, chérie; cette réception est exceptionnelle, car Simon a invité un prophète que les gens commencent à regarder comme le Baptiste.
- Qui est-ce ? Ai-je demandé, le cœur battant la cha­made.
- Jésus de Nazareth.
- Oh ! Martha, Martha, alors j’irai. Fais-moi belle, lave mes cheveux, enduis mes paupières de jasmin, passe du cinabre sur mes lèvres, parfume-moi !


Je me sentais défaillir. « Maria, Maria, me disait Mar­tha en me tenant les mains, tu t’évanouis, tu vas tomber. » Elle voulait savoir la raison de ce revire­ment. Des sentiments contraires se bousculaient dans mon cœur : « Sois patiente, j’ai besoin de repos et de réflexion ; le silence doit se faire en moi si je veux entendre la voix de Dieu. »

   Je me suis retirée dans ma chambre, refermant la porte de la terrasse pour faire l’obscurité, non par en­vie de dormir, mais de rêver et de revoir ma vie pas­sée. Ma décision était prise, j’irais. « Je dois m’ar­ra­cher au désir de Simon pour me donner à celui qui m’aime. Je ne pourrai pas atteindre l’amour sans mé­pri­ser celui qui fait de moi un objet, une idole con­jurée contre le sexe. L’ombre de ma mère doit me laisser en paix. » J’ai recouvert mon visage d’un voi­le pour mieux m’abandonner à mes souvenirs.





Roman achevé en 2002




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t320102 : 11/05/2013